Le confinement a fait du mal au porte-monnaie
L’institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) publie son bilan social 2020. Cette étude révèle que la situation financière de 28 % des Guadeloupéens s’est dégradée suite au premier confinement.
Un terrain plus propice à une hausse de la précarité
Comme en France, l’évolution de la situation financière lors du confinement est liée au niveau de vie. Trois quarts des Guadeloupéens indiquant ne pas s’en sortir sans faire de dettes avant la crise, estiment que leurs difficultés se sont accrues en mai 2020. Ils ne sont que 3 % à le déplorer parmi les personnes qui s’estiment aisées en temps normal. L’impact de la crise pour les ménages est ainsi lié à la condition initiale de chacun. Or, en Guadeloupe, le taux de pauvreté atteignait 34 % en 2017 et le taux de privations matérielles et sociales 41 % en 2018. Des taux près de trois fois plus élevés qu’en France métropolitaine.
Les personnes en activité ne sont pas épargnées
En Guadeloupe, un tiers des personnes en emploi avant le premier confinement estime que sa situation financière s’est dégradée au cours de celui-ci, malgré la multiplicité des dispositifs d’aides et l’adoption de nouvelles organisations de travail. Le télétravail a notamment permis à nombre d’actifs de préserver, au moins dans une certaine mesure leur activité et leurs revenus.
Les Guadeloupéens n’ayant pas pu y recourir sont deux fois plus nombreux (29 %) à déplorer une dégradation de leur situation financière que ceux ayant pu y recourir totalement (15 %). Peu répandu avant le début de la crise, le télétravail a connu un véritable essor en 2020, mais reste une alternative limitée à certaines activités et certains métiers. Il s’est notamment nettement plus généralisé auprès des cadres, professions intellectuelles supérieures (71 %) et professions intermédiaires (45 %) qu’auprès des employés (31 %) artisans et commerçants (27 %) pour qui le recours au chômage partiel a été plus fréquent.
Les non-salariés, dont la part dans l’emploi en Guadeloupe est supérieure au niveau national (17 % contre 12 %), sont également très exposés au risque de diminution voire de perte de leurs revenus, selon leur secteur d’activité. Des aides forfaitaires à leur endroit ont également été prévues pour amortir la chute brutale de l’activité mais ne compensent pas toujours la totalité des revenus habituels. Ainsi, deux artisans et commerçants sur trois ont vu leur situation financière se dégrader en Guadeloupe, contre un cadre sur cinq.
Les travailleurs temporaires concentrent les risques
Les travailleurs temporaires (en CDD, en intérim, les intermittents) et les travailleurs non déclarés sont encore plus exposés aux risques engendrés par la crise. Certains ont vu la fin de leur contrat correspondre à la période de confinement, les empêchant de retrouver rapidement un emploi. Ainsi, les travailleurs intérimaires ont perdu beaucoup d’opportunités d’emploi avec une chute de 17 % des déclarations préalables à l’embauche sur l’année, soit une perte de 8 900 missions, particulièrement au deuxième trimestre (- 44 % par rapport au premier trimestre). Concrètement, cela représente une perte de quatre missions dans l’année, en moyenne, pour chaque travailleur intérimaire d’avant crise. Un manque à gagner susceptible d’aggraver des situations de précarité.
Le secteur de l’hôtellerie et de la restauration est particulièrement concerné, le nombre de déclarations de CDD s’effondre de 75 %. C’est également le secteur qui distribue les plus faibles rémunérations (inférieures de 40 % au revenu salarial moyen en Guadeloupe). Le secteur des autres services marchands suit avec une chute de 53 % ainsi que celui du commerce qui recule de 35 %. Même si la reprise s’opère vivement dès le troisième trimestre, les déclarations d’embauche des deux derniers trimestres de 2020 restent inférieures à celles de 2019. Tous secteurs confondus et hors intérim en Guadeloupe, le bilan annuel des embauches en CDD comme en CDI totalise une baisse de 18 % entre 2019 et 2020.
Les jeunes en difficulté
Entre 2019 et 2020, les personnes de moins de 25 ans signent entre 19 % et 33 % des contrats courts (de moins d’un mois) selon les trimestres d’observation. Les embauches des jeunes se concentrent en particulier dans les secteurs d’activité qui ont été à l’arrêt complet ou régulièrement au cours de l’année 2020 (hôtellerie, restauration, services). Leurs difficultés se sont accrues et additionnées. En effet, sauf à être parent, ils ne répondent pas aux critères d’âge pour prétendre au RSA, le revenu de solidarité active (allocation pour les moins de 25 ans portant les ressources initiales du foyer jusqu’au niveau d’un revenu garanti) et n’ont souvent pas eu une activité suffisante pour bénéficier d’une indemnisation au titre du chômage. Ils peuvent donc basculer très vite dans la précarité.
Le dispositif « Garantie jeunes » propose une double aide à destination des moins de 25 ans en situation de précarité qui ne sont ni en emploi, ni en études, ni en formation. Il prévoit une allocation et un accompagnement dans une activité professionnelle pendant 12 mois. Mais l’entrée de nouveaux bénéficiaires dans le dispositif au cours de l’année a été largement perturbée par la fermeture des centres d’accueil. De 630 jeunes Guadeloupéens aidés en décembre 2019, ils sont passés à seulement 500 en août avant de revenir en fin d’année au même niveau qu’avant la crise.
Enfin, les étudiants ont vécu une année particulièrement compliquée. Les cours à distance, ont accentué les difficultés scolaires et le sentiment d’isolement pour une partie d’entre eux. Les perspectives d’insertion sur le marché du travail ou les problèmes financiers, liés à la perte d’un job, sont autant de motifs de détérioration de leurs conditions de vie. À titre d’exemple, aux Antilles-Guyane, 42 000 repas à 1 € ont été servis à 2 750 étudiants boursiers sur les quatre derniers mois de l’année.
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